En mars 2015, une coalition internationale dirigée par l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis est entrée en guerre au Yémen. Elle entend combattre le mouvement politique armé Houthi, allié aux forces fidèles à l’ancien président yéménite Saleh pour ramener au pouvoir le président internationalement reconnu, Hadi. Souvent qualifié de guerre par procuration entre l’Arabie saoudite et l’Iran sur fond de tensions interconfessionnelles, le conflit au Yémen reflète en réalité une mosaïque de luttes de pouvoir et de tensions au niveau local ainsi que de multiples fractures dans la société yéménite. Héritages d’évènements récents et d’une histoire séculaire, ces fractures sont les braises sur lesquelles viennent aujourd’hui souffler les différents acteurs d’un conflit qui a pris une dimension internationale.
La guerre oubliée du Yémen : impasse militaire, casse-tête politique et catastrophe humanitaire
Après plus de trente mois de combats, aucune des parties au conflit ne semble en mesure d’obtenir une victoire militaire décisive, et une solution politique apparaît plus éloignée que jamais tant les parties semblent incapables de faire des concessions ni même vouloir discuter de paix. Pendant ce temps, la guerre a achevé de détruire ce qu’il restait du système économique, de gouvernance et de sécurité du Yémen. À l’agonie, “l’Arabie heureuse” est devenue le tombeau des droits de l’homme et a sombré dans un cauchemar humanitaire et un casse-tête politique. La population civile paie le prix fort dans un conflit où l’ensemble des parties sont accusées de violations répétées du droit international humanitaire et du droit international des droits de l’homme. Les membres de la coalition sont accusés d’asphyxier le pays et sa population provoquant l’une des plus graves crises humanitaires au monde.
L’intervention militaire de la coalition est rendue possible grâce aux armements et munitions fournis par un grand nombre de pays occidentaux et à une assistance militaire déterminante des États-Unis. Si la responsabilité de la catastrophe qui se déroule actuellement au Yémen incombe en premier lieu aux différentes parties au conflit, les États impliqués dans la production et le commerce des armes endossent également un certain niveau de responsabilité politique , morale et légale en raison des conséquences dramatiques liées à l’usage qui est fait de leurs armes. La violence, la destruction et le chaos de la guerre sans issue menée par la coalition au Yémen se poursuivront tant que la majorité des pays occidentaux soutiendra aveuglément ses alliés du Golfe obstinés à chercher une improbable issue militaire au conflit.