Historiquement, le caractère “gelé” de la guerre au Haut-Karabakh, autre moyen de désigner le rapport de forces favorable à l’Arménie, était assuré par deux éléments de dissuasion. L’un était technique, et concernait la capacité balistique de l’Arménie de détruire directement le cœur de l’économie azerbaïdjanaise en cas d’attaque trop ambitieuse. L’autre était diplomatique, et concernait l’alliance, ou plutôt la mise sous dépendance, de l’Arménie à la Russie, qui garantissait à la première que la Turquie n’interviendrait pas, et que le rapport de forces ne serait donc pas inversé.
Si l’effectivité du premier élément demeure désormais discutable, le second existe toujours dans les traités, les discours et certains faits, comme les livraisons d’armes. Néanmoins, la politique étrangère de la Russie vis-à-vis de ce conflit implique l’entretien de l’instabilité, afin de s’assurer d’une part une présence militaire à la frontière de l’OTAN, de l’autre maintenir sa crédibilité comme exportateur et pays de transit d’hydrocarbures vers l’Union européenne.
La dynamique générale semble même démontrer certaines approbations tacites de la Russie, du moins une absence de veto, à une reprise des hostilités. Durant les combats d’avril 2016, le président Poutine a tout juste appelé les parties à observer immédiatement le cessez-le-feu. Si les pays européens restreignent de manière stricte les exportations d’armes aux deux belligérants afin de ne pas attiser le conflit, cette politique a également pour conséquence d’accroître la dépendance des adversaires à leurs grandes puissances protectrices, Turquie mais surtout Russie, qui exercent déjà une influence majeure sur les développements ou non-développements de la guerre.