Que ce soit vis-à-vis de l’Allemagne nazie, de l’Union soviétique ou… de l’intégration européenne, Winston Churchill a toujours su voir plus loin que ses contemporains. De manière vague et imprécise, certes, mais sincère néanmoins, il souhaitait que l’Europe continentale évolue à terme vers une véritable fédération. Il évoquera même le terme d’États-Unis d’Europe à ce propos. Car Churchill aimait l’Europe, et parlait volontiers de civilisation européenne, dont le nazisme constituait à ses yeux la négation.
Mais Winston Churchill ne pensait pas que le Royaume-Uni devait participer à ce processus d’intégration politique qu’il souhaitait pour le reste du continent. Sans doute voyait-il son pays comme un pont au milieu de l’Atlantique, reliant une Europe unie aux États-Unis, dans le cadre d’une relation transatlantique forte et solidaire.
Même mort, Churchill continue à voir plus loin que les générations qui lui ont succédé. Car c’est bien ce chemin-là que l’Europe doit prendre à présent. L’UE ne doit pas adopter une attitude punitive vis-à-vis du Royaume-Uni, mais elle doit relancer, parallèlement, le processus d’intégration politique du Vieux Continent. En commençant par la politique étrangère, de sécurité et de défense commune, qui moisit dans les couloirs de Bruxelles depuis des années.
Européens et Britanniques sont destinés à rester côte à côte face aux grands défis sécuritaires internationaux. Mais pas nécessairement dans le cadre de l’UE, pas forcément dans ses structures.
Ainsi, le référendum sur le Brexit aura eu l’indéniable mérite de rendre visible ce qui était pourtant évident, mais incroyablement ignoré par la plupart des experts et spécialistes jusqu’à présent : la politique étrangère et de défense européenne ne peut progresser en compagnie des Britanniques. C’était clair hier, et est devenu éclatant aujourd’hui. Il ne s’agit guère d’une opinion, mais d’un fait. Et il ne peut désormais plus être nié.
Que les Britanniques franchissent définitivement la porte de l’UE ou qu’ils reviennent par la fenêtre, la question doit être posée une fois pour toute : comment avancer sans eux ? Quelle relation entre une politique de défense européenne renouvelée et le Royaume-Uni ? Quid du lien transatlantique ? En d’autres mots : que faire pour suivre les conseils visionnaires de ce bon vieux Winston ? Des questions qui auraient dû être posées il y a longtemps. Mieux vaut tard que jamais.
Crédit photo : illustration de Arend van Dam
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