Le 1er mars 2024, le Nicaragua a déposé devant la Cour internationale de Justice (CIJ) une requête introductive d’instance contre l’Allemagne accompagnée d’une demande en indications de mesures conservatoires, parmi lesquelles se trouvaient la suspension immédiate des fournitures de matériel militaire allemand à Israël compte tenu du risque qu’il soit employé par Tsahal pour commettre des violations graves de droit international dans le Territoire palestinien occupé, en particulier dans la bande de Gaza. Le 30 avril 2024, la CIJ a rendu son ordonnance dans laquelle elle a rejeté l’ensemble des demandes du Nicaragua, ne considérant pas que les circonstances nécessitaient l’imposition de mesures conservatoires. Cette Note d’analyse examine le contenu de cette ordonnance et expose la façon dont la décision de la Cour, et en particulier ses silences, peut se comprendre comme une forme de repli stratégique lui permettant de rester saisie de l’affaire. Cette Note commence par analyser la façon dont la CIJ a rejeté l’argument de l’Allemagne selon lequel elle était manifestement incompétente pour trancher ce différend si Israël n’y était pas partie. Elle discute, ensuite, des éléments sur lesquels la Cour s’est appuyée pour postuler la solidité du système allemand de contrôle des exportations de matériel militaire et de ce fait justifier qu’il n’y a pas lieu d’ordonner la mise en place de mesures conservatoires. Enfin, elle revient sur le commentaire plus général que la CIJ fait au sujet des obligations incombant aux États exportateurs d’armes, et qui peut être lu comme un avertissement adressé à l’ensemble des États de la communauté internationale à faire preuve de vigilance dans le cadre de leurs politiques d’exportation de matériel militaire vers Israël.