Sortir du giron de la Russie ? L’avenir de l’Arménie dans l’OTSC

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L’offensive azerbaïdjanaise de septembre 2023, qui a scellé la disparition de l’Artsakh, a mis en lumière la vulnérabilité de l’alliance sécuritaire entre l’Arménie et la Russie au sein de l’Organisation du traité de sécurité collective (OTSC). Ayant gelé sa participation à l’organisation et évoqué un possible retrait, Erevan cherche désormais à élargir ses partenariats extérieurs.

Tant au sein de la classe politique que dans l’opinion publique arménienne, des voix de plus en plus nombreuses remettent en question la pertinence du maintien de l’Arménie au sein de l’OTSC, appelant à une redéfinition stratégique de ses partenariats extérieurs. En 2023, l’Arménie a gelé sa participation aux exercices communs de l’OTSC et depuis 2024, elle ne finance plus et ne participe plus aux décisions communes de l’organisation[5].

Quitter ou rester?

La prochaine étape serait de quitter l’organisation, ce qu’a promis de faire le Premier ministre Nikol Pashinyan en juin 2024. Le rapprochement avec les États-Unis et l’Union européenne, bien que perçu par le pouvoir comme une alternative souhaitable, soulève toutefois la question de la viabilité d’un tel réajustement.

« En l’absence de garanties concrètes des puissances occidentales, la rupture des ponts sécuritaires avec Moscou risque-t-elle d’exacerber les vulnérabilités de l’Arménie ? »

En l’absence de garanties concrètes émanant des puissances occidentales, la rupture des ponts sécuritaires avec Moscou risque-t-elle d’exacerber les vulnérabilités de l’Arménie ? Quels sont les leviers, les contraintes et les perspectives qui conditionnent cette décision cruciale ? Voici quelques unes des questions qu’aborde cette note.

Sortir du giron russe

Pour cerner les contours de ces questions, cette analyse procède en quatre étapes. La première commence par explorer l’avenir de la paix avec l’Azerbaïdjan, car en l’absence d’un traité bilatéral signé et ratifié par les deux parties, une rupture complète des liens sécuritaires avec Moscou serait risquée. La seconde partie expose l’emprise économique de la Russie sur le pays, notamment les ramifications énergétiques et financières qui pèsent encore lourdement sur les choix diplomatiques d’Erevan. La troisième étape évalue la solidité des partenariats alternatifs que l’Arménie tente de construire, notamment avec les États-Unis, l’Union européenne, mais aussi avec l’Inde ou l’Iran. Enfin, l’ultime étape procède à un examen de la situation intérieure ; celle-ci restant marquée par une fragilité politique croissante.

À travers cet examen, il s’agit d’évaluer si l’Arménie dispose aujourd’hui des moyens politiques, diplomatiques et institutionnels pour sortir du giron russe ou si ce désir d’émancipation reste, pour l’heure, un fantasme géopolitique.

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[1] Mieux connu sous le nom du Haut-Karabakh, autrefois région autonome à majorité arménienne de la république socialiste soviétique d’Azerbaïdjan dont la volonté de rattachement à l’Arménie fut à l’origine d’une guerre victorieuse pour les Arméniens (1988–1994) qui sera suivi suivie d’une reconquête par les forces azéries à l’automne 2020, prélude à la dissolution complète de l’autonomie en septembre 2023 et à l’exode de la plupart des 120 000 Arméniens qui y habitaient encore.

[2] Une version non officielle de l’accord a été publiée sur le site de la Présidence russe. « Statement by the President of the Republic of Azerbaijan, Prime Minister of the Republic of Armenia and President of the Russian Federation », Kremlin.ru, 10 novembre 2020.

[3] Asbarez Staff, « CSTO Will Intervene Only if ‘Territory of Armenia’ is Attacked », Asbarez, 8 octobre 2020. Cette position sera maintenue malgré les attaques subséquentes en territoire arménien, dans les secteurs frontaliers qui demeurent à ce jour occupés par les forces azéries.

[4] Le corridor de Zanguezour désigne la route de transit demandée par l’Azerbaïdjan à travers le sud de l’Arménie, visant à relier l’exclave azérie du Nakhitchevan (qui touche la Turquie) au reste du pays.

[5] Areg Kochinyan, « Armenia Leaving Russian-Led CSTO », Friedrich Naumann Foundation for Freedom, 25 juillet 2024.

 

Photo: Rencontre entre le Premier ministre arménien Nikol Pashinyan et le président de la Fédération de Russie Vladimir Poutine, le 7 avril 2021 – crédit : Kremlin.ru, wikimedia

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